Qu'est-ce que le yaoi ? des mangas pas comme les autres…

S’il y a une catégorie de manga clivante, c’est sans doute le yaoi… Détesté par certains, adoré par d’autres, souvent critiqué de toutes sortes de manières, il est difficile de comprendre ce qui se cache derrière ces mangas sans avoir un peu de contexte. Alors, qu’est-ce vraiment que le yaoi ? D’où vient-il ? Pourquoi a-t-il ce statut à part dans le manga ?

ATTENTION : Cet article traite de thèmes pouvant heurter la sensibilité des plus jeunes.

Le yaoi : définition et origines

Le yaoi est un genre de manga, généralement écrit par et pour des femmes qui décrivent des relations amoureuses ou sexuelles entre deux hommes, de manière parfois très crue. Il y a souvent une dimension transgressive, c’est donc un genre à aborder avec précaution, surtout si vous êtes jeune lecteur ou lectrice.

Il possède un équivalent féminin qui met en scène des femmes, le yuri, mais celui-ci est souvent moins mis en avant.

Des œuvres yaoi ont vu le jour tout au long du XXe siècle, mais c’est dans les années 70 qu’il se définit comme un genre à part entière (d’abord sous le nom de shōnen-aï) et se détache du shojo dont il est issu. Les premières histoires mettent souvent en scène des bishonens, des jeunes hommes au physique délicat, et beaucoup d’histoires ont un ton tragique (on peut y retrouver des amours interdites ou le trope « bury your gay », aujourd’hui très critiqué).

Le genre s’est surtout développé dans les cercles de dōjinshis, des artistes amateurs reprenant des personnages de séries célèbres en les sexualisant, ou créant leurs propres personnages et histoires dans des mangas autoédités. Il est donc directement lié à un milieu marginal de « fans » se retrouvant autour d’une passion commune.

L’absence d’éditeurs permet une créativité sans limites et l’émergence d’un genre à part, avec ses codes et sa culture propre. Hors du yaoi « assumé », de nombreux shōjos sous-entendant des relations homosexuelles voient le jour, comme dans les œuvres de Clamp.

Toya et Yukito, de Clamp, sont deux personnages qui auront beaucoup inspiré les autrices de yaoi.
Toya et Yukito (Card Captor Sakura, de Clamp) sont présentés comme des amis très proches. Même si ce n’est jamais dit explicitement qu’ils sont amoureux, les autrices insistent bien sur la dimension spéciale de leur relation et laissent la porte ouverte aux fans pour imaginer leur histoire…

« Yaoi » est un acronyme pour yama nashi, ochi nashi, imi nashi qui peut se traduire par « pas de climax [dans la narration], pas de chute [au récit], pas de sens [à l’histoire] ». Ce nom autodérisoire est établi en 1979 et a été diffusé par un cercle dōjinshi influent. 

https://fr.wikipedia.org/wiki/Yaoi

Cette citation montre bien l’autodérision des fans d’un genre ambigu, qui mélange passion et autodérision, drame et parodie.

Petit point vocabulaire

  • Shōnen-aï : le terme, ancien, a servi à désigner le genre avant d’être remplacé par le mot yaoi. Il a servi (tout particulièrement en France) à désigner les romances « tout public » par opposition au yaoi, qui était considéré comme explicite. Aujourd’hui, le terme est un peu démodé en France, et encore plus au Japon ou il a pris une connotation négative en désignant des histoires impliquant de très jeunes garçons.
  • Yaoi : le terme japonais, associé à d’autres abréviations plus explicites que je ne vous écrirai pas ici. Il désigne surtout les mangas/animés japonais et a une connotation pornographique ou ancienne chez certaines personnes.
  • Slash : terme venu des USA et de la fanfiction pour désigner des romances entre hommes. Le mot slash désigne le symbole séparant le nom des deux personnages du couple (par exemple : Sirius/Remus). N’est plus très utilisé aujourd’hui.
  • Ship : terme venu de l’anglais, il remplace les mots slash ou pairing. Il peut être utilisé comme un nom (« le ship Royed ») ou comme un verbe « I ship it » ou « Je shippe ces deux-là ».
allégorie d'une fujoshi
  • Bara : le terme utilisé par opposition au yaoi pour désigner les mangas dessinés « par des gays, pour des gays ». À utiliser avec précautions, car c’est une insulte au Japon que la communauté s’est partiellement réappropriée, mais que certains gays désapprouvent (un peu comme le mot « gouine » en français).
  • Boys love (ou BL) : désigne les romances gays au sens large, quel que soit la nationalité ou le format utilisé. C’est aujourd’hui le terme le plus utilisé, car il est plus inclusif et n’a pas les connotations négatives des mots cités ci-dessus.

Les tropes du yaoi

Le genre du yaoi, comme la plupart des genres de mangas, est extrêmement codifié. Ces structures ou éléments récurrents ont été créés, repris, réécrits et pris à contrepied par plusieurs générations d’autrices. Que l’on considère ça comme des codes indissociables ou des clichés à bannir absolument, ils sont en tout cas très associés à l’image que l’on a du yaoi aujourd’hui. Alors, quels sont-ils ?

Seme et uke (le brun/le blond)

Un couple yaoi se caractérise le plus souvent par une séparation entre seme (dominant) et uke (dominé), qui dicte leur rôle dans le couple et les relations sexuelles. À partir de cette définition, on retrouve souvent des caractéristiques associées aux hommes pour un seme : grand et fort, dirige et prend les décisions pour deux, exprime peu ses sentiments, sauf par des à-coups parfois violents (domination, agressivité ou jalousie…)

À l’opposé, le uke a souvent une apparence et des comportements associés aux femmes : généralement plus jeune, petit et frêle, avec des traits androgynes, facilement débordés par ses émotions, il s’en dégage une impression de fragilité. Un comportement hors des codes sociaux, qui, bien souvent, perturbe le seme et remet en question sa vision du monde.

Okane ga nai, un bon exemple de personnages de yaoi clichés
Les personnages d’Okane ga naï (No Money) sont des exemples caricaturaux des clichés des yaois, à la fois dans le physique des personnages et dans leur relation à base d’abus et de domination…

Pour accentuer la différence entre les personnages et mieux les distinguer, on a souvent eu un grand brun seme et un petit blond uke… Mais de plus en plus, ce cliché est aujourd’hui utilisé à contrepied, avec des physiques et caractères inversés, ou tout simplement en abandonnant totalement cette dualité pour créer des personnages plus neutres.

En lisant des yaois anciens, on remarque que ces figures très codifiées autour du masculin et du féminin reprennent beaucoup les clichés d’une relation hétérosexuelle, un indice supplémentaire que le yaoi est avant tout adressé aux femmes.

Entre fantasmes et identification, ce genre permet d’explorer une sexualité hors de la réalité des lectrices. Ce décalage permet à la fois de créer une distance rassurante dans la représentation de situations parfois violentes, tout en exprimant une part de désirs et de questionnements qui ne sont pas forcément acceptés socialement de la part de femmes.

La fiancée/casseuse de yaoi

En parlant de femmes, comment sont-elles représentées dans les yaois ? Et bien, assez peu, surtout dans les vieux titres.

Tout comme dans les romances et shōjos classiques, le triangle amoureux est un élément récurrent. Quand il ne s’agit pas d’un troisième personnage gay, aux mœurs souvent douteuses, c’est en général une femme qui prend le rôle. Qu’il s’agisse d’une ex ou d’une fiancée dans un mariage arrangé, le personnage sert surtout à mettre en avant une société qui ne laisse pas la place à un couple homosexuel d’exister, ou encore à pousser à l’action un personnage principal indécis.

Dans ces mangas très centrés sur des relations entre hommes, les femmes sont souvent effacées ou prennent un rôle d’antagoniste. Cela peut être de manière directe, avec ce personnage de « casseuse de yaoi », ou de manière plus détournée, en étant par exemple un membre de la famille ayant une relation compliquée avec un des protagonistes. C’est un choix narratif pratique, mais assez négatif pour les personnages féminins, qui alimente une vision misogyne (une ironie dans un genre écrit par et pour des femmes.).

« Tout le monde est gay ici ! »

Il n’est pas rare, dans les yaois, d’avoir un casting totalement masculin et d’avoir des couples secondaires gay également, donnant l’impression que l’histoire se déroule dans un monde sans hétéros. C’est notamment le cas dans Sukisyo (2005).

Cette banalisation de l’homosexualité permet de créer un « monde idéal » avec un cadre où l’homosexualité n’est plus un tabou… Une occasion de représenter le couple de manière explicite et positive, sans pression sociale extérieure ni la dimension dramatique souvent présente dans les tout premiers yaois.

Ce côté « idéal » ne laisse pas toujours la place aux femmes, mais dans ce genre de yaois, elles sont parfois présentes, sous forme de couples lesbiens (comme dans Loveless).

Loveless, un "shonen-aï" proposant un couple lesbien parmis les personnages

« Pourquoi est-ce que mon cœur bat aussi fort ? »

Les protagonistes sont souvent représentés comme étant très peu éveillés à leurs propres sentiments et désirs (même pour des Japonais). « Que m’arrive-t-il ? » « Pourquoi est-ce que mon cœur bat aussi fort ? » « Je ne peux pas être amoureux de lui ! »

Autant de phrases qui montrent un manque d’expérience et/ou un déni de leur homosexualité, y compris chez des personnages tout à fait adultes. C’est aussi l’occasion d’offrir aux lecteurs, soit une première relation, soit des sentiments anormalement intenses, pour rendre le tout aussi exceptionnel que possible.

Sekaïchi Hastukoi, un yaoi parmi les plus connus de son époque
Sekaïchi Hatsukoi – l’autrice de Sekaïchi Hatsukoi et Junjou Romantica, est un peu le symbole du style « grands mentons, grandes mains » que l’on associe encore aujourd’hui au yaoi

Bref, comme beaucoup de clichés, cet aspect peut être bien manié, ou au contraire, tomber dans la caricature, surtout quand ces réactions assez prudes s’associent à une sexualité débridée.

« Je ne peux pas m’en empêcher »

Dans les vieux yaois, le seme est très souvent représenté comme étant fortement dominateur, initiant les rapports sans laisser le choix à son partenaire. La zone grise (ce moment de flottement dans une relation ou l’un des personnages fait des choses sous la pression et sans forcément le vouloir lui-même) et le viol sont des éléments récurrents dans le genre… C’est d’ailleurs l’une des principales raisons pour lesquels il est critiqué !

Derrière cette phrase « je ne peux pas m’arrêter », il y a l’idée que le uke est irrésistiblement attirant, au point de faire perdre le contrôle au seme, un personnage souvent très cérébral. Il y a aussi un représentation des fantasmes les plus tabous. Le uke qui dit « non » peut alors représenter une forme de morale ou de culpabilité, plus qu’un véritable refus. Malheureusement, ces représentations, quand on manque de recul, peuvent contribuer à banaliser des comportements inacceptables.

Viewfinder, le yaoi qui a traumatisé une génération de lectrices !
Viewfinder est l’exemple type du yaoi ou le viol est érotisé, mais semble dénué de conséquences physiques comme psychologiques… à ne pas reproduire chez soi !

L’omegaverse

L’omegaverse est un sous-genre du yaoi qui a depuis essaimé dans les romances hétérosexuelles. Issu de la fanfiction, il se base sur une séparation de la population, entre alpha, bêta et oméga. Les Alpha, dominants, réagissent de manière impulsive face aux Omégas qui les attirent irrépressiblement. Et les bêtas, qui représentent la majorité de la population… et bien, on s’en fiche un peu.

Ce genre est directement inspiré de théories (réfutées depuis) sur la hiérarchie sociale dans les meutes de loups, et se rattache très fortement aux notions de pulsion et d’animalité : rapport de dominations, hormones et phéromones, chaleurs… Généralement très cru, il peut être l’expression des pires fantasmes comme un bac à sable pour remettre en question la banalisation du viol et les rapports de domination dans notre société… ou même les deux à la fois.

Si vous êtes curieux d’en savoir plus sur ce genre, vous pouvez regarder la vidéo de Théodore Pralinus à ce sujet. Sa chaine regorge de vidéos assez poussées sur les yaois et shojos !

À propos de ces clichés

Vous l’aurez compris, le yaoi est essentiellement un genre pornographique gay à destination des femmes. Et comme tout récit de ce genre, le scénario est parfois assez minimal, parce que l’intérêt est ailleurs… Mais ce n’est pas non plus une règle absolue ! Il en existe aussi sans scènes explicites, avec un scénario parfois très complexe. Enfin, de manière générale, il vaut mieux retenir qu’il n’est pas destiné à tous les publics, et se renseigner avant d’en lire ou d’en offrir, afin de savoir où on met les pieds.

Je vous ai résumé les principaux clichés, car ils ont façonné le genre et sont difficilement contournables, mais sachez que je peux citer des contre-exemples pour chacun des éléments dont je vous ai parlé ici ! Comme toujours, les clichés ne seront pas systématiquement dans un manga, quel que soit son genre !

Comme vous l’aurez constaté, les clichés véhiculés par le yaoi sont parfois problématiques, et ont été critiqués plus d’une fois par les lecteurs comme par un public extérieur… ce qui l’a poussé à évoluer énormément.

La réception du yaoi

Le yaoi, comme tout genre spécifiquement féminin, souffre d’une vision sexiste qui dévalorise ce qui est créé par et pour les femmes, et son association avec le monde des fanfictions (et donc le travail d’autrices amatrices) n’arrange rien. Enfin, il aborde des sujets particulièrement sensibles (sexisme, sexualité, culture du viol) de manière parfois peu subtile. Pour toutes ces raisons, il a été le sujet de nombreuses critiques, parfois à juste titre.

La controverse du yaoi

Entre 1992 et 1996 a lieu la controverse du yaoi (やおい論争, yaoi ronsō), un important débat par essais interposés dans le magazine féministe Choisir. Ce débat oppose d’une part des militants gays et des militantes féministes, qui accusent le yaoi d’être homophobe en donnant une vision viciée de l’homosexualité masculine et d’être hétérosexiste en renforçant la misogynie de la société japonaise.

D’autre part se trouvent des auteurs et éditeurs de yaoi, soutenus par des militants féministes et lesbiens, qui estiment que le yaoi est une fantaisie féminine qui n’a pas pour but de décrire l’homosexualité masculine ni d’être réaliste, et présentent cette fantaisie comme un refuge face à la misogynie de la société, par ailleurs ils adoptent un discours queer de confusion des genres, sexes et sexualités et considèrent que ce sont leurs opposants qui font preuve d’hétérosexisme.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Yaoi

Je vous partage cette citation, car elle résume bien ce qui se joue autour de ce genre très particulier : en abordant des sujets sensibles, le yaoi met en lumière des faits de société, sans le remettre en question systématiquement. Que ce soit les rôles stéréotypés dans un couple, les rapports de domination, le sexisme ou l’homophobie, ce sont des questions qui apparaissent, volontairement ou non, dans les yaois et qui sont plus ou moins bien traitées.

Autant de questions très politiques que des autrices, parfois très jeunes, ne se posent pas quand elles créent par passion et partagent leurs visions fantasmées et destinées à des personnes « comme elles ». Désignées comme étant des « fujoshis » (littéralement « filles pourries ») les fans de yaoi devaient souvent dissimuler leur passion à l’intérieur de leur communauté ou risquent d’être jugées et mises à part.

Les critiques venues de l’extérieur de ce cercle de fans sont parfois violentes, ou utilisées pour réduire au silence des autrices, mais elles soulèvent quand même des questions qui méritent d’être posées. Quand le yaoi est une vision fantasmée des rapports amoureux et sexuels des Japonaises, est-ce leur faute s’il rend plus visible quelque chose qui existe déjà ? Et faut-il accepter des représentations considérées comme mensongères ou avilissantes par les principaux concernés ?

Comme ce sont des questions plus complexes qu’il n’y parait, la popularité grandissante du yaoi a justement ouvert des espaces de discussions sur ces sujets. Et si les débats sont loin d’avoir cessé, les différentes générations d’autrices ont remis en question ce qui existait déjà, en créant ce qu’elles auraient voulu voir ou en se nourrissant des débats parfois enflammés pour faire des représentations plus réalistes ou plus saines, créant un patchwork d’histoires riche et varié.

Tout cela fait du yaoi, un support lié malgré lui à des questions politiques et sociologiques, alors qu’il est né de l’envie de partager des passions à l’intérieur d’un cercle de fans féminines.

des fujoshis unies pour trouver le meilleur boy's love !
« Une camarade d’arme avec qui partager ses fétiches, en quête du meilleur boy’s love. » Au-delà de la représentation des fujoshis mises au ban et jugées pour leurs goûts « déviants », se trouvent aussi de belles amitiés ! (Otaku Otaku)

La réception du yaoi en France

Le yaoi est arrivé en France en grande partie via la fanfiction, qui, comme les dōjins au Japon, permet à des amateurs de mettre en scène leurs personnages préférés, au format écrit et de manière plus ou moins aboutie. Le genre en France est donc particulièrement associé avec cette idée de quelque chose d’amateur, de pornographique, parfois même grotesque. Pourtant, il est aussi un espace de représentations queer, avec des personnages gays ou des représentations hors-normes (comme des hommes enceints, des personnages changeant de sexe, etc..) Qui a eu un véritable rôle au sein de la communauté LGBTQIA+ en France.

Les mangas ont été pour beaucoup une porte d'entrée vers des questionnements sur leur identité queer.
L’infirmerie après les cours n’est pas un yaoi, mais il est la première représentation que j’ai pu voir d’un personnage intersexe (même s’il ne me semble pas avoir vu le mot utilisé dans le manga)

Avec le milieu des fanfictions et du fanzinat, le genre s’est peu à peu implanté en France. Les éditeurs français se sont ensuite emparés des yaois, le secteur connaissant un boom à partir de 2005 tout en restant un marché de niche. Des maisons d’édition comme Asuka et Taïfu se sont spécialisées dans la vente de yaoi, et d’autres éditeurs comme Akata en publient parmi d’autres titres abordant des thèmes LGBTQIA+ au sens large.

En marge des éditeurs officiels, le yaoi se développe aussi beaucoup en auto-édition, avec des autrices françaises proposant des romances entre hommes. Implanté dans le paysage français, il n’est plus un jardin secret partagé par une poignée de fans… mais, même si beaucoup de fans de manga connaissent maintenant son existence, beaucoup préfèrent encore contourner le genre.

Yuri on ice!! Le yaoi tout public par excellence
La sortie de l’anime « Yuri on ice!! » en 2018, même s’il n’est pas un yaoi à proprement parler, a connu un grand succès et contribué à rendre le genre plus visible.

Quelques titres à découvrir

Maintenant que vous en savez plus sur le contexte général, je vous propose de parler de quelques titres qui m’ont marquée. C’est une liste subjective, il en existe beaucoup d’autres que je n’ai pas cités, mais j’espère que ceux-ci vous permettront de vous faire une idée de la diversité du genre !

Banana fish (1985, version animée sortie en 2018)

Banana fish, une référence du manga

Un titre inclassable, publié dans un shōjo, avec un scénario digne d’un bon seinen et de nombreuses scènes d’action, il présente une relation platonique entre les deux personnages principaux sur fond d’enquête et de guerre de gangs. Sans être directement un yaoi (pas de scènes explicites), il a eu un gros impact sur le genre et a récemment été réédité.

Les graphismes ont pris un coup de vieux, mais en passant outre, il reste un très bon titre pour permettre aux lecteurs de shōnens ou seinens de mettre un petit pas dans le monde du yaoi sans trop se mouiller !

Le carnet de notes d’Endo-Kun (2010)

le carnet de notes d'Endo-Kun, un yaoi au trait délicat

Cette romance lycéenne aux personnages hésitants se caractérise par un trait épuré et une certaine pudeur. L’absence de scènes explicites en fait un titre accessible à tous les publics, mais l’autrice parvient à faire sentir une certaine tension érotique entre les personnages. Le graphisme et le découpage peu classiques peuvent dérouter.

Ce one-shot peut se lire indépendamment, mais une suite en deux tomes (le carnet d’expériences d’Endo-kun) a été publiée depuis.

Kii Kanna (l’étranger de la plage, l’étranger du zéphyr, Qualia under the snow…)

Illustration de Kii Kanna

Kii Kanna est une autrice de manga représentative de la nouvelle vague des Boy’s love. Avec son trait doux, elle dépeint des relations et scènes de la vie quotidienne avec tendresse. Qualia under the snow est un one-shot et reste très chaste dans la relation des personnages principaux. Cela peut être une bonne porte d’entrée pour les lectrices de shōjos.

Le Jeu du chat et de la souris (2006)

Le jeu du chat et de la souris, un yaoi mature.

Quand un homme infidèle se retrouve dans le collimateur d’un ancien camarade de classe qui le fait chanter en échange de faveur…

Ce manga en 2 tomes a fait partie des sorties marquantes de mon adolescence. Attention, contient des scènes explicites ! Il y a des choses à redire du côté du consentement et de la représentation de la bisexualité, mais sa finesse dans la description de relations humaines et la notion de fidélité en fait tout de même un titre intéressant.

In these words (commencé en 2011, en cours)

In these words, un boy's love sanglant...

Un tueur en série arrêté par la police annonce qu’il ne fera ses aveux qu’à un profiler qui l’obsède. Celui-ci accepte de le rencontrer, mais tout ne se passe pas comme prévu…

Ce manga au style graphique très reconnaissable est réalisé par deux Chinoises vivant aux USA. Destiné à un public averti, il est très cru, à la fois sur le sexe et sur la violence, mais son scénario digne d’intérêt peut en faire une bonne lecture pour ceux qui n’ont peur de rien.

Conclusion

Le yaoi est et restera une catégorie de niche, qui ne plaira pas à tout le monde (et ce n’est pas fait pour). Cependant, le considérer comme un sous-genre serait très réducteur, alors qu’il connait une grande popularité à travers le monde et que les titres peuvent être d’une grande diversité, du plus chaste au plus scandaleux, et explorer toutes sortes de situations et d’univers.

Les yaois plus récents ont d’ailleurs considérablement changé en s’appuyant sur les critiques passées. On trouve aujourd’hui des titres très matures, qui représentent des relations plus réalistes et saines, ou au contraire, explorent frontalement la question du viol. Sa popularité l’a ouvert aux regards et critiques extérieurs, faisant beaucoup évoluer les questionnements et les représentations !

En tant qu’autrice et exposante, j’ai pu constater cette évolution : en moins d’une décennie, j’ai vu de plus en plus d’hommes s’intéresser au yaoi, feuilleter et acheter sans juger (ni être jugés). L’important dans un manga reste de découvrir une histoire, et rester sur un a priori peut faire passer à côté de jolies découvertes…

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